Je vais vous raconter une histoire. Elle n'est pas de moi mais je vous assure, elle est bonne. Je vous la livre mot pour mot, du haut de mon talent hors du commun pour la traduction du suisse-allemand. Je vous épargne le début, fort rébarbatif, marqué par l'annonce inattendue du mariage de Toni (44 ans, artiste) à une illustre inconnue. Sa soeur et sa belle-soeur, toutes deux respectables mères de famille, discutent la nouvelle, le faire-part entre les mains.
Ouvrez les guillemets:
- Mais quel drôle de nom: Catherine Ndolé! Ca ne sonne pas du tout suisse. Où a-t-il bien pu l'attraper?- Toni a été au Cameroun avec deux copains il y a quelques mois. Il a certainement attrapé une gazelle noire un peu trop fort.- C'est dingue! Lui qui a attendu si longtemps, voilà qu'il trouve quelqu'un d'une toute autre culture. Espérons que ça se passera bien et que ça durera un peu!- Il y a deux ans, il avait pourtant une gentille copine de la région de Berne, une fille de paysan les pieds sur terre avec des joues comme des pommes et des yeux comme des myosotis. Elle aurait fait une épouse travailleuse et dégourdie pour lui.- Il a toujours été le mouton noir de la famille.- Alors une femme noire lui conviendra à merveille!
Fermer les guillemets.
Vous me direz "Tasha, nous raconter le contenu de ton manuel de suisse-allemand, tu l'as déjà fait". C'est vrai. A partir de deux posts sur un même sujet, considère-t-on qu'il s'agit d'acharnement médiatique?
J'ai hésité. Pour faire pardonner mon manque d'originalité, je vous propose de la diversité dans la conclusion: deux variantes à choix, selon vos goûts et convictions:
1. L'auteure de "Züritüütsch verstaa, Züritüütsch rede" fait preuve d'une honnête intellectuelle hors du commun. Elle met dévoile ce que des Suisses se racontent tout bas, à l'abri des regards dans leur cuisine. Elle nous livre un tableau sans concession du racisme ordinaire et bien pensant. Son manuel dépasse alors la simple dimension linguistique: il prend une ampleur sociologique. Chapeau bas.
2. L'auteure a écrit cette saynette comme un événement anodin de la vie d'un Alémanique moyen. Sans trace de hargne ou d'agressivité, du ton aussi badin qu'elle évoque les courses au marché ou la journée au bureau. Tant de candeur dans la formulation de cette suffisance occidentale rappelle étrangement "Tintin au Congo". Publié en 1930.
Ouais en fin. Tous mes amis de Zurich traiterait
des gens d'idiot (Vollidiot).
Mais c'est vrai que en suisse allemande il faut un peu regarder par dessus l'épaule avant de balancer sur l'armée.
Rédigé par: hans | le 29/10/2011 à 20:22
Il n'y a là ni suffisance, ni racisme.
Et Tintin au Congo, c'est très bien.
Rédigé par: Robert Marchenoir | le 11/05/2012 à 21:17